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Fabien B.
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Pour des mobilités péri urbaines (par Jean Michel Morer) Empty Pour des mobilités péri urbaines (par Jean Michel Morer)

Mar 02 Fév 2016, 13:05
Jean Michel Morer, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, est le maire de Trilport (membre élu de la communauté d'agglomération). Si il est étiqueté PS, il est avant tout un élu de terrain impliqué, intéressé par les questions politiques (et non politiciennes), des questions qui concernent le quotidien de tout le monde, et fait montre d'une grande réflexion à travers le blog qu'il tient depuis plusieurs années à présent : Entre Marne et forêt . Un blog vraiment d'une grande qualité, sérieux, pas du tout nombriliste, et comme on aimerait en lire d'avantage.

Je partage avec vous aujourd'hui l'une de ses notes sur la question des mobilités, et notamment du transport ferroviaire et de la Ligne P (qui concerne autant Meaux que Trilport).


__________

Pour des mobilités périurbaines

Si la dégradation des transports franciliens (retards, suppressions, état de propreté, travaux … ) impacte tous les usagers sans exclusive, elle est encore plus mal ressentie par ceux qui y passent le plus de temps. Depuis l'été, une ligne SNCF sinistrée (la ligne P) illustre les conditions de transports quotidiennes, plus que limites, subies par les usagers en 2016.

Impliqué sur les questions de mobilité depuis plus de dix ans, en qualité de Maire d'une ville seine et marnaise de 5000 habitants dotée d'une gare située sur la ligne P, mais également comme Vice Président d'une Communauté d’Agglomération constituant un véritable hub pour plus de 200 000 personnes vivant dans différents bassins de vie du Nord Est Seine et Marnais, je suis devenu au fil des ans, presque malgré moi, quelque peu spécialiste « es mobilités péri urbaines ».

Ce billet reprend pour l'essentiel la trame d'une note élaborée dans le cadre des élections régionales, ses propositions sont essentiellement tournées vers le péri urbain, je l'assume. Ces territoires ont trop longtemps été considérés comme de simples variables d'ajustement, alors qu'ils représentent des terres de vie, d'épanouissement, pour tout dire, des terres d’avenir.

Je veux souligner que beaucoup de mesures mises en place sous l'autorité de Jean Paul Huchon, dont le cadencement, ont apporté une incontestable valeur ajoutée sociale et induit de nouveaux usages, elles ont contribué incontestablement à changer la vie au quotidien, à ouvrir de nouvelles perspectives à des territoires qui en manquaient cruellement jusque là.
Paradoxalement, elles font apparaître en creux aujourd’hui toutes les faiblesses et les lacunes d’un réseau sous dimensionné, obsolète, souffrant de plus de trente ans de sous investissement et d’abandon, que ce soit au niveau des voies comme du matériel roulant.
J'en veux pour preuve la multiplication quotidienne des incidents et des dysfonctionnements d'aujourd'hui qui exaspèrent au plus haut point des usagers durement mis à l’épreuve depuis l’été dernier.

Les mobilités en Grande Couronne constituent une priorité absolue et urgente, tant nos territoires attirent de plus en plus d’habitants, cette tendance démographique est en pleine accélération, alors que son réseau est plus que thrombose. Pourtant beaucoup d'élus de nos territoires craignent légitimement que la métropolisation en cours n'amplifie les inégalités territoriales et sociales déjà très grandes, pour faire simple que la grande métropole n'aspire tous les moyens financiers et logistiques.
Nous savons que si aucun investissement d’envergure n’est lancé dans les prochains mois pour nos territoires, c’est toute l’Ile de France qui se retrouvera paralysée demain. L'inquiétude des élus, vu les budgets locaux contraints, est que l’essentiel des moyens financiers ne se concentrent que sur le seul réseau du Grand Paris Express. D'autant que ce dernier possède de vraies zones d’ombre : sous estimation financière des infrastructures souterraines, pas ou peu de prévision sérieuse sur le cout des reports modaux. Le fait multimodal et les charges afférentes n’apparaissent pas dans aucun modèle financier, conséquence l’addition risque d’être beaucoup plus salée que celle initialement envisagée.

Mes propositions ne se limitent pas aux seuls investissements lourds, elles intègrent les spécificités liées à la dimension péri-urbaine. Je suis persuadé qu'il faut promouvoir une lecture novatrice, pro active, transverse, et prospective des enjeux, potentialités et contraintes de nos territoires, les réponses doivent être adaptées et plus que tout contextualisées. Le péri urbain c’est de la vraie dentelle urbaine, allant du transport de masse au "sur mesure", notamment sur le traitement des derniers kilomètres en grande couronne.

L’urgence, vu la multiplicité des clés d’entrée, est de dégager une problématique lisible, quelques priorités claires, de concilier des actions de nature diverses portant sur le court, le moyen et le long terme, tant sur l'investissement que le fonctionnement. Elles sont cependant toutes liées les unes aux autres, de fait, car les mobilités péri urbaines sont par nature systémiques.


Quelles propositions pour transformer radicalement le quotidien de milliers, voir de millions d'usagers ?


Pour des mobilités péri urbaines (par Jean Michel Morer) 17848310


Pour des usagers pressés (dans les deux sens du terme), acteurs et échelles de temporalité se confondent, mais les spécialistes savent que les décisions stratégiques prises dans les prochaines semaines ne trouveront de traduction concrète que dans plusieurs années; c’est en cela que cette période est déterminante.

Le préalable afin d’éviter tout flou, jamais artistique en ce domaine, est de clarifier les missions de chaque acteur, dont principalement celui du Syndicat des Transports d’Ile de France (STIF), garant de la qualité des conditions de transport et non représentant des opérateurs. Le STIF fixe les orientations stratégiques, traduites en objectifs et en engagements des entreprises, sur le niveau, la qualité et le coût du service rendu aux voyageurs. Les contrats signés entre le STIF et la RATP d’une part, et le STIF et la SNCF d’autre part donnent un cadre dans lequel chacun assume son rôle et ses missions dans l’organisation et le développement des transports en commun en Île-de-France.

Encore faut il que les priorités affichés soient claires, assumées, que le champ des responsabilités des uns et des autres bien différencié, afin que le «c’est pas moi, c’est l’autre » en cas de problème rencontré ou remonté (style les trains courts) cesse … Si l'opérateur, quelque qu’il soit, se doit de respecter les modalités du contrat signé avec le STIF (priorités, objectifs qualitatifs ou quantitatifs …), ce dernier se doit également de lui donner les moyens de le faire concrètement et d’assumer les choix et arbitrages effectués au préalable.


Quelques pistes de réflexion :


- Diversifier et élargir le champ des causes de pénalités financières dues par les opérateurs : humanisation et présence en gare, nombre de wagons composant les trains lors des heures de pointe (le recours aux trains courts ne peut être que tout à fait exceptionnel) et pénaliser tout ce qui contribue à la dégradation du service.

- Les indicateurs qualitatifs doivent représenter les performances de l’ensemble d’une ligne, non les globaliser. Les dysfonctionnements impactant le plus souvent les mêmes segments, généralement situés à la fin de la ligne et ressentis encore plus durement par les usagers au quotidien. Lorsqu’un habitant de Lizy s/ Ourcq entend dans une réunion que les indicateurs de la ligne P sont bons, il peut penser légitimement qu’on se moque de lui.

- Créé un « observatoire » indépendant des opérateurs, ouvert aux usagers, accessible par internet, permettant à tout utilisateur d'obtenir le reporting des incidents, leur nature, les conséquences, les pénalités infligées et les mesures de remédiation lancées … Indiquant également de manière plus globale les dotations financières accordées aux opérateurs, les indicateurs de performance du réseau, les objectifs fixés ….


Rénovation du réseau


Inévitablement l'effort financier principal immédiat, vu le temps entre prise de décision et réalisation concrète, doit porter sur la rénovation globale d'un réseau laissé de coté durant plus de trente ans, excepté ces dernières années. Vu son état de vétusté, c'est le lancement d'un plan d’investissement massif sur les lignes sinistrées de la Grande Couronne qui s'impose.

La ligne P illustre les contrastes de l'Île-de-France à l’heure du Grand Paris. Longue de 252 km, fréquentée au quotidien par 85 000 usagers, de plus en plus nombreux, elle dessert 36 gares sur 3 départements et s’étire à plus de 90 km de Paris, allant jusqu'à Château-Thierry ou La Ferte-Milon. Plus de 6 types de matériel roulant différents y circulent, compliquant d’autant maintenance du matériel et bonne gouvernance de la ligne et multipliant les problématiques de gestion de parc, quelquefois quasi insolubles du fait des contraintes logistiques (remplacement de pièces en cas d'incident, pannes récurrentes suite à la vétusté des fameux "petits gris").


Les propositions d'actions concernant cette ligne sont des plus évidentes :


- Deux segments de cette ligne ne sont toujours pas électrifiés (Provins et la Ferté Milon), les derniers de la région. Cette situation est d'autant plus intolérable qu'elle accentue la fracture territoriale. Cette situation a un autre inconvénient majeur et qui le sera de plus en plus chaque année; elle mais empêche toute amélioration de la desserte lors des heures de pointe, sur des gares urbaines très fréquentées, telles celles de de Meaux et Trilport, au bassin de vie supérieur à 100 000 habitants, dont la croissance démographique est en plein essor (plus d'1% l'an). Ne pas lancer l'électrification, c'est s'interdire d'agir concrètement et efficacement sur l'amélioration de l'offre dans les dix années à venir. Intolérable et inimaginable.

- Réaliser les aménagements nécessaires (voies et quais) permettant aux gares de Trilport à la Ferté sous Jouarre (toutes électrifiées) d’être enfin desservis par les «Nouvelles Automotrices Transilien ». Une remarque, il n'est pas admissible que cela n'ait pas été fait au préalable; il est pour le moins paradoxal, voir scandaleux, que des rames de nouvelle génération attendent au repos, alors que dans le même temps la SNCF propose aux usagers lors des heures de pointe des trains courts, vu la vétusté des rames y roulant ! C'est la cause principale des trains courts d'aujourd'hui !

- Toute rénovation d'un réseau qui n’en avait pas connu depuis des décennies est source de multiples désagréments quotidiens. Les campagnes de communication en ce domaine ne présentent aucune perspective sur leurs raisons, leurs logiques, les étapes et les phases d'amélioration.  Il s’agit pourtant de rendre le réseau plus sur, plus fiable, plus performant, évolutif. Il est essentiel de présenter aux usagers l'importance stratégique de ces investissements lourds, les avantages sur leur sécurité, la fiabilité et les performances ultérieures (fréquence, vitesse, incidents) du réseau. Lorsque la communication n’est pas à la hauteur, comme c’est le cas, que les travaux s’éternisent, les usagers, au quotidien déjà très malmenés, ne ressentent plus très logiquement que les contraintes. Il n'est pas admissible que faute de communication suffisamment étayée mais également suivie et présentant un échéancier de réalisation et des perspectives concrètes d'amélioration, les travaux de rénovation, portant indispensables, contribuent au sentiment général de dégradation des conditions de transport.


Le fait Multimodal

La véritable clé de voute de tout système complexe de mobilité, est le pôle de multimodalité, constitué par les gares, qu’elle soient ferroviaires ou routières. Au delà d'un simple rôle de nœud de réseau ou d’interface, chacune constitue un véritable écosystème local de mobilités. Situation qui résume toute la complexité à agir avec efficience, mais démontre également l'absolue nécessité d’apporter des réponses qui soient adaptées à un contexte précis et de privilégier, entre autres qualités, l'agilité, la souplesse, l'évolutivité. Force est de constater, u'aujourd'hui nous en sommes jusque là très éloigné :

- Le dispositif actuel des « pôles gares » n’est pas satisfaisant : trop complexe, long à mettre à place, cette véritable usine à gaz est victime du moindre grain de sable. Conséquence, des montants financiers considérables sont immobilisées et pourtant rarement dépensés. Ce modèle administratif, refroidit les élus ou acteurs les plus dynamiques, dés qu’un "partenaire" ne veut pas jouer le jeu, c’est tout le processus d’aménagement et de mise en place qui est bloqué pour des années, si ce n'est des décennies. En terme de blocage, certains acteurs sont d'éminents spécialistes (anciennement RFF), alors que paradoxalement au regard de leurs missions initiales, ils auraient du en être les principaux animateurs. Il faut un pilote, un arbitre, un échéancier, une gouvernance resserrée et plus que tout des décisions qui soient suivies d’actions concrètes et rapides. A mon sens, c'est tout le dispositif qui est à mettre à plat, totalement caricatural d'une vision kafkaïenne de l'inaction en matière de politique publique.  Il est inadmissible que les opérateurs clés du système, détenteurs le plus souvent de fonciers stratégiques, constituent des freins plutôt que des accélérateurs en terme d'amélioration des mobilités quotidiennes des franciliens.

- Il est nécessaire, même si la nécessité de privilégier la desserte en transport en commun est évidente, de considérer le stationnement des voitures comme une composante à part entière de la chaine des mobilités et de préserver en ce domaine, non une logique de site, mais une logique de ligne. La voiture individuelle en grande couronne constitue souvent un passage obligé pour les usagers et une réalité très concrète. Elle occasionne pour les communes abritant une gare, un lot considérable de contraintes, que certaines au regard de leur petite taille ne peuvent assumer seules.
Les élus locaux se retrouvent totalement abandonnés face à des problématiques insolubles (stationnement, sécurisation). Les voitures sont liées à la gare, comme la marée à la plage. Il faut redéfinir le champ des responsabilités et des financements, et pour ce faire, il m'apparait très opportun d’intégrer le prix du stationnement au titre de transport, de professionnaliser la gestion des parkings en privilégiant une logique de ligne (développement capacitaire, sécurisation, services ajoutées : nettoyage …), de déployer des bornes de recharge pour voiture électrique, des aires de covoiturage, des points de transport à la demande, que les opérateurs de mobilité dont c'est le job soient en capacité d’intervenir sur les périmètres à proximité des gares, en appui logistique et financier des collectivités, notamment des plus petites dont la gestion de tels espaces n’est ni la mission ni la vocation, surtout lorsqu’elles ne sont pas dimensionnées pour le faire et que l'essentiel des voitures qu'elles accueillent est en provenance d’autres collectivités.

- Développer le co voiturage en menant une politique agressive d’incitation : emplacements réservés sur les parkings, tarification préférentielle (parking offert si 3 places occupées dans la voiture …) et en synergie avec des opérateurs tel BlaBlaCar

Relancer le Transport à la Demande autour de concepts innovants. Nous devons en 2016 avoir la capacité d’apporter une réponse institutionnelle régulée à l’Uberrisation et de construire un modèle économique agile et vertueux, ayant un réel potentiel de croissance, bien moins onéreux que la mise en place de lignes régulières dans des secteurs démographiques peu importants, ou sur certains créneaux horaires ou le week end.

- Le secret d’une multi modalité épanouie est d'être simple, lisible par tous. Une des grandes forces du STIF est sa capacité à fédérer tous les acteurs qui interviennent dans la longue chaine des mobilités. Créer un seul titre de transport dématérialisée sous forme de carte à mémoire (ou paiement NFC) pour tous les services liés aux mobilités sur le territoire régional, rechargeable à partir de bornes automatiques présentes dans toutes les gares (train, métro, bus) ou parkings, mettre en place une tarification de type « Navigo Plus » intégrant des compléments tel qu'un abonnement parking à tarif préférentiel, des locations de vélos, de voitures en auto partage est un objectif atteignable dans les prochaines années.

- Contribuer au développement de nouvelles tendances sociétales, telles le télétravail. La Région a contribué à soutenir la création d’un réseau de tiers lieux (télé centre, espace de co-working …) qu’il est important de pérenniser en développant leur utilisation par les entreprises, institutions et salariés : conventions et partenariats, tarifications préférentielles, labellisation, système d’abonnement, contrôle des présences effectives, centrale de réservation, paiement par la billettique transports (de type Navigo Plus)

- Limiter la montée en charge lors des heures de pointe grâce à des incitations financières. Diminuer la fréquentation des réseaux de transport lors de créneaux clés, du matin comme du soir, est une amélioration directe des conditions de transport. C’est une révolution, qui si elle est lente à initier et demandera certainement des années, représente des économies budgétaires très substantielles, tant en fonctionnement qu’en investissement


Les propositions ne manquent pas, tant le péri urbain nous amène à revoir les schémas traditionnels autour des mobilités. De nouveaux concepts émergent, comme celui de contextualisation, synergies, d'éco système, d'agilité ... Des mots clés représentatifs de la société d'aujourd'hui basée sur l'accélération du temps, l'importance de l'information et du relationnel. Il faut lier le Penser global comme l'écrit Edgar Morin, à la pensée complexe,  dans le sens premier de "complexus" qui signifie "relié", "tissé ensemble". Mot qui définit bien l'essence de la multimodalité.

Les mobilités péri urbaines nous imposent d'apporter des réponses adaptés à chaque contexte, que ce soit celui du transport de masse avec ses logiques, ses contraintes et ses repères traditionnels, ses pesanteurs, ses couts, mais également celui du quasi sur mesure, qui nécessite une approche plus circonstanciée faisant appel à de nouveaux modèles économiques ...
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