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Fabien B.
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Lun 20 Juil 2015, 23:25
Petit exercice d'architecture : et si on reconstruisait la tour sud de la cathédrale de Meaux ?
Ci-dessous deux versions différentes présentées dans un groupe facebook.

Première proposition par Laurent Duguet : 
la reconstruction de la tour sud à l'identique de la tour nord. pour un résultat symétrique faisant penser à Notre Dame de Paris (de laquelle est inspirée la cathédrale de Meaux).

Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? 11754410


Seconde proposition, par Frank Olieu : 
Une version contemporaine et dissymétrique : la tour est un collage de l'église du Jubilée de rome, par Richard Meier. 

Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? 11755110


Dernière édition par Fabien B. le Lun 03 Aoû 2015, 14:27, édité 1 fois
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Mar 21 Juil 2015, 21:02
J'avais aussi essayé le Hancock Center de Chicago, mais ça le fait moins !
(Même si géométriquement, c'est tout à fait adapté)
Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Cathan11
Fabien B.
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Mar 21 Juil 2015, 22:03
Hey mais c'est pas mal du tout non plus ça fromax (Frank) Wink Pas sans faire penser à l'église du souvenir à Berlin (cf. image ci-dessous, source : wikipedia)

Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? 280px-10
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Mar 21 Juil 2015, 23:17
Réputation du message : 100% (1 vote)
Bien vu, effectivement... Le nouveau clocher reprend également la forme polygonale du vieux :

(photo de moi, CC)
Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Berlin10
Fabien B.
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Jeu 23 Juil 2015, 12:49
Héhé... bon c'était facile, des exemples d'extensions (ou reconstructions) contemporaines de cathédrales ou d'édifices religieux on n'en trouve pas des centaines. Par contre ce genre d'intervention patrimoniale, qui mixe ancien et contemporain est assez fréquent, notamment sur les édifices culturels du types musées ou théâtres. 

A Meaux, intervenir sur la cathédrale serait spectaculaire, mais aussi dispendieux et peu utile. A quoi servirait cette tour ? 

Par contre d'autres bâtiments appartenant au patrimoine local peuvent bénéficier de (ou subir) ce genre d'intervention contemporaine. Et c'est le cas du projet de l'ancienne Maison d'Arrêt reconvertie en pôle culturel... dont les travaux sont hélas au point mort pour le moment.
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Téel
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Ven 24 Juil 2015, 16:15
Je rappelle que la cathédrale a déjà été victime des architectes restaurateurs du XIXème siècle, qui l'on certes, sauvée de la ruine, mais aussi irrémédiablement modifiée pour lui donner un aspect qu'elle n'a jamais connu de son histoire. Laissons-là ce pauvre édifice qui a déjà bien souffert, et contentons nous d'appliquer un peu plus scrupuleusement la charte de Venise aux monuments historiques, pour commencer Smile

Ceci dit, c'est un excellent cas d'école à proposer aux étudiants de Chaillot ! A quoi servirait cette tour ? J'y verrais bien un restaurant gastronomique qui mettrait à l'honneur le patrimoine culinaire de la région. Miam.
Fabien B.
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Ven 24 Juil 2015, 22:37
La restauration du patrimoine à la Viollet Le Duc... je ne suis pas contre. Dans le cas de cathédrale de Meaux, le problème c'est qu'elle n'a jamais eu de son histoire une forme bien définie, et elle n'a cessé de se reconstruire sur elle même au fil des siècles, depuis l'édifice originel qui était sans doute un lieu de culte gallo-romain, remplacé par une église romane, jusqu'à aujourd'hui : le chœur a du être reconstruit parce qu'il menaçait de s'effondrer, les tribunes qui couraient le long des bas-côté ont du être supprimés, elle a perdu sa flèche, la tour nord a remplacé un befroi qui se trouvait légèrement décalé par rapport au reste de l'édifice... ce qui fait que la partie de la nef entre la façade et le transept est de traviole, et cette partie de la nef est même deux fois plus courte qu'elle n'aurait du être parce que l'espace du parvis ne permettait pas qu'on avance plus la façade. Rien n'est droit dans cette cathédrale, tout penche, tout est gauche, tout est de guingois... il n'y a aucune unité, de style ou de genre. C'est une histoire du style gothique à elle toute seule cette cathédrale de Meaux. Objectivement si on s'en fit aux canons de l'architecture, cette cathédrale est ratée, elle n'est pas belle. Et paradoxalement c'est cette accumulation de défauts qui lui donne un certain charme.

Bref elle pourrait tout à fait accueillir une extension contemporaine sans que de mon avis l'on puisse retenir la question patrimoniale comme objection. Enfin je précise que ce n'est pas moi qui ai lancé l'idée... je l'ai juste repris d'un groupe de discussion facebook.

Pour ce qui est de savoir ce que l'on pourrait faire dans cette extension : absolument tout ce que l'on veut : des bureaux, une bibliothèque, une école, un centre culturel, un restaurant gastronomique aussi.

Après tout pourquoi considérer certains édifices comme intouchables ? Pourquoi est-ce que leur sens ne pourraient pas évoluer, ou changer avec l'époque ? N'est-ce pas mieux que de laisser l'édifice vide ou le voir pourrir ?

Il y a quelque chose que je n'ai jamais compris : c'est pourquoi à la Révolution (entre autre), lorsque les biens du clergé et de la noblesse ont été réquisitionnés par l'Etat, on a su faire de ceux-ci dans bien des cas que des carrières de pierre ou des granges à foins, voir des prisons. Que des beaux bâtiments (et je pense qu'ils ont toujours été considérés ainsi) ont été oubliés et abandonnés, quand ils auraient pu être investis, réutilisés, habités... et par la même conservés sans laisser le temps les abîmer (en faire palimpsestes). Il aura fallu attendre le 19ème siècle pour que ce qui tombait en ruines soit restauré (et la cathédrale de Meaux et sa cité épiscopale en font parti).

La question se pose par ailleurs aujourd'hui avec notre patrimoine, un peu partout, et à Meaux entre autre : qu'est-ce que l'on fait de la Bauve, de la Chapelle Jean Rose, des remparts, du Vieux Chapitre... ?


Dernière édition par Fabien B. le Mer 29 Juil 2015, 22:56, édité 1 fois
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Mer 29 Juil 2015, 18:54
Fabien B. a écrit:
Il y a quelque chose que je n'ai jamais compris : c'est pourquoi à la Révolution (entre autre), lorsque les biens du clergé et de la noblesse ont été réquisitionnés par l'Etat, on a su faire de ceux-ci dans bien des cas que des carrières de pierre ou des granges à foins, voir des prisons. Que des beaux bâtiments (et je pense qu'ils ont toujours été considérés ainsi) ont été oubliés et abandonnés, quand ils auraient pu être investit, réutilisés, habités... et par la même conservé sans laisser le temps les abîmer (palimpsestes). Il aura fallu attendre le 19ème siècle pour que ce qui tombait ens ruines soit restauré (et la cathédrale de Meaux et sa cité épiscopale en font parti).

La question se pose par ailleurs aujourd'hui avec notre patrimoine, un peu partout, et à Meaux entre autre : qu'est-ce que l'on fait de la Bauve, de la Chapelle Jean Rose, des remparts, du Vieux Chapitre... ?
 
C'est facile à comprendre. D'abord, la période de "saccage" fut brève : quelques années tout au plus (l'empereur y mit le holà) et les biens nationaux (saisis à la noblesse et au clergé réfractaires) ont été revendus à la bourgeoisie pour l'essentiel, qui les a achetés non pas à des fins de sauvegarde du patrimoine sous forme de mécénat, mais pour se faire de la thune (encore que ça a sauvé bien des châteaux et palais épiscopaux quand les parvenus les ont occupés)
Un peu partout en France en outre, des préfectures ou sous préfectures étaient de ces bâtiments. Melun fut désigné chef-lieu car il avait de ces bâtiments, pas Meaux pourtant initialement préféré.

Pour les prisons? C'est parce qu'il y avait un énorme besoin puisque avant la Révolution, on emprisonnait fort peu! On pendait pour rien (les exécutions de la Terreur n'ont pas égalé un an de "justice" de l'ancien régime en ce domaine), on envoyait sur les galères ou aux bagnes, ou on appliquait des châtiments corporels. C'est la justice napoléonienne qui a introduit la systématisation de la réclusion.

Cordialement 

.


Dernière édition par benjamin le Jeu 30 Juil 2015, 10:51, édité 1 fois
Fabien B.
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Mer 29 Juil 2015, 23:10
Merci pour ces explications Benjamin. 
Je ne faisais pas référence au moment de la Révolution où on saccageait et pillais. Juste au moment d'après, une fois "l'excitation" passée. 

La remarque sur les prisons est intéressante !
benjamin
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Jeu 30 Juil 2015, 14:33
Fabien B. a écrit:Merci pour ces explications Benjamin. 
Je ne faisais pas référence au moment de la Révolution où on saccageait et pillais. Juste au moment d'après, une fois "l'excitation" passée. 

La remarque sur les prisons est intéressante !



Quand on réfléchit à l'histoire, il ne faut jamais tomber dans deux travers pourtant communs. Je fais ici un copié-collé d'un texte que j'ai écrit il y a longtemps et qui illustre ce propos, texte en couleur qui n'est dans le sujet que de manière très transversale (pour ne pas dire carrément HS) et que pour ce motif Fabien pourra effacer s'il l'estime opportun.

Ensuite, je reviendrai à l'architecture


Le premier travers, le plus courant, c'est de raisonner en fonction de ce qu'on connaît de la fin des événements (jouer à la roulette en sachant par avance quel numéro sortira).

Ainsi on a ainsi du mal à piger pourquoi tel ou tel groupe d'individus prirent une position qu'avec le recul, on juge aberrante, suicidaire

Exemple. Ces soldats perdus qui, très jeunes, se sont battus en 1945 dans la SS et y ont combattu avec rage, persuadés de la victoire finale. On les prend de nos jours - tout raisonnement idéologique et moral mis à part - pour des couillons, en oubliant qu'ils avaient entre 15 et 18 ans,  qu'ils étaient nés après 1933, année de la prise de pouvoir de Hitler, donc que toute leur vie ils baignèrent dans la certitude de l'omniscience de leur führer et sous la "meilleure" propagande qui fut jamais instituée, avec Goebbels. Alors quand on évoquait les armes miracles qui allaient d'ici quelques jours renverser le cours de la situation, leur disant qu'il suffisait de tenir quelques semaines, ils y croyaient dur comme fer. C'est facile en 2015 de ne voir que stupidité dans ce "raisonnement". Cet exemple est un, parmi d'innombrables autres. A posteriori les héros de la France libre, ceux de juin 1940, étaient certes animés d'un patriotisme inouï mais à l'exception de quelques très rares individus hautement cultivés, pétris d'histoire et de connaissances géostratégiques, ils étaient bel et bien les fadas de l'époque quand on comparait le vainqueur de juin 1940 et ce qu'il y avait en face (certes jamais dans l'histoire, les puissances continentales n'ont gagné à long terme contre les puissances maritimes; depuis, des historiens rompus au raisonnement global l'ont établi, mais à l'époque ce n'était guère le cas)

Le second travers qui nous intéresse le plus ici, c'est d'analyser les faits d'une époque passée, parfois lointaine, parfois relativement récente, avec la mentalité de notre époque
.

Prenons l'exemple de l'homosexualité telle qu'elle était perçue auparavant... Quasiment institutionnelle dans l'Antiquité, très largement tolérée au Moyen-Âge sous condition que cela reste du domaine strictement privé (le péché de bougrerie en était surtout un quand il faisait opposition aux commandements de l'église défiée par sa publicité. Ce n'est pas lui qui était condamné, en soi, mais le défi lancé à la dite église). Idem pour la pédophilie qui n'est réprimée en pratique que depuis quelques décennies sauf quand les faits étaient particulièrement horribles et... concernaient des gens du peuple. Seul contre exemple flagrant: Gilles de Rais, mais le meurtre dans des conditions atroces de plusieurs centaines de petits garçons, "c'était vraiment trop" et cela risquait de menacer l'ordre établi en soulevant le peuple contre l'autorité naturelle. Se serait-il contenté de commettre le péché de bougrerie avec des garçonnets dont les familles (issues des serfs de la région) auraient été rétribuées en compensation qu'il serait demeuré le Connétable honoré de tous. Plus tard on ne peut lister la liste des Grands de ce monde affublés du vice infâme menant le peuple au bûcher et parfaitement admis et respectés - notamment le fils ainé de Louis XIV qui en plus, à ses moments perdus, était une drag-queen avant l'heure.

Idem plus tard avec Sade. Il aurait fouetté ses soubrettes dans un château paumé de province que sans doute il serait resté un pervers inconnu. Mais il a commis ses actes à Paris et dans les environs, cela s'est su, à une époque où les Lumières commençaient à ouvrir les mentalités, où le peuple commençait à gronder et il fallait éviter que l'opinion s'émeuve par trop. D'où son embastillement que des esthètes du XXIe siècle persistent à considérer comme un scandale contre le génie. Sade eut été un clampin moyen, qu'on l'eut pendu très vite à la Croix du Trahoir (il n'aurait même pas mérité la place de Grève)

Plus près de nous, alors même que toucher des petits garçons ou des petites filles était réprimé sévèrement quand ça se faisait au sein du peuple (mais les cas d'inceste dans les bonnes familles étaient soigneusement étouffés), la société dans son ensemble admettait qu'on pratiquât la chose pour peu que ce soit dans certains milieux dits éclairés. Cocteau, Montherlant, Gide, Peyrefitte pour ne citer qu'eux en profitèrent largement quand de nos jours ils passeraient en cour d'assises. Peyrefitte, de son vivant, a détaillé avec minutie ses pratiques dans ses propos secrets (qui furent dans les années 70 un énorme succès de librairie). Pratiques qui, quarante ans après le mèneraient en prison comme pointeur.
Exemple éclairant que celui de Gide, pédéraste connu comme tel par tous, qui renia le communisme qui l'avait un moment séduit - et à l'époque quand on faisait ça aux staliniens ils se déchainaient, et pas dans la dentelle. Il fut attaqué de toute part dans les organes du Parti, mais très peu, et juste de manière allusive, sur ses pratique sexuelles. Plus tard le régime pétainiste et sa glorification de l'ordre moral et de la famille lui fichèrent aussi une paix royale. Et même, ce pouvoir prit comme ministre de l'instruction publique Abel Bonnard, dont l’appétence exclusive et obsessionnelle pour les garçons et les très jeunes hommes était connue (Pétain le surnommait gestapette, mais il déjeunait avec lui dans la plus grande cordialité). Pendant ce temps, des pauvres types surpris en position ambiguë dans une vespasienne étaient tabassés au commissariat avant d'être expédiés directement au STO.

L'opinion du moment, les autorités, la justice, l'église, intégraient parfaitement, jusqu'il y a peu de temps, qu'une certaine élite intellectuelle, artistique ou politique  ait des mœurs différentes, bénéficie en ce domaine de l'impunité quand bien même leurs actes étaient des crimes ou des délits sévères.
La famille de Radiguet le laissait fréquenter Cocteau... Aurait-il fait la vie ouvertement avec Mimile le fraiseur qu'il eut été soit renié, soit envoyé en "rééducation" dans un pensionnat strict. Quant au Mimile...

Sur un autre plan... considérer les femmes comme des citoyennes à part entière. Alors que nombre d'entre elles militaient avant guerre dans divers partis et syndicats, ces femmes engagées étaient les premières (sauf quelques suffragettes très minoritaires) à être réticentes quant au droit de vote accordé aux femmes. Cela pour le motif que soumises en grand nombre au curé (qui à l'époque se mêlait directement du temporel et dispensait ses consignes de vote) elles contribueraient au succès de la réaction. En 1945 quand ce droit de vote leur fut enfin accordé, un des premiers sondages de l'époque révéla que les opposantes à cette disposition étaient aussi nombreuses que... les opposants! Mme de Gaulle, par exemple, reprocha fortement à son mari d'avoir donné aux femmes une responsabilité de plus.

/....  /....


Les exemples abondent. Quand on doit juger des réactions de la société face à tel ou tel fait ou circonstance, prendre garde de toujours les mettre en perspective avec l'air du temps. Faute de quoi on commet immanquablement des anachronismes, et l'anachronisme est à l'histoire ce que le non sens est à la rhétorique.

****************


En quoi cela concerne-t-il l'architecture, la conservation et la rénovation du patrimoine?

La notion de conservation nécessaire du patrimoine architectural est très récente, de même que le principe désormais acquis de conserver l'existant sans chercher à faire des reconstitutions hasardeuses, fussent-elles séduisantes. Le passé, très longtemps, fut ignoré.

Nos château-forts, pour la plupart en ruines de nos jours? La plupart d'entre eux sont dans cet état parce que devenus inutiles au moment de la généralisation de l'artillerie qui rendit vulnérable des forteresses auparavant imprenables ou peu s'en faut, et personne ne s'est soucié de les garder en l'état "pour l'histoire" (surtout qu'ils étaient inconfortables au possible). Il y eut ensuite Richelieu qui fit démanteler un grand nombre de forteresses encore susceptibles de gêner la prééminence royale, à tout le moins araser tours et remparts. L'idée même semblait totalement incongrue de conserver ce "patrimoine", surtout que les pierres taillées et les autres matériaux généraient une source de revenus conséquente lorsque leurs propriétaires étaient là, pillés sinon: de nombreux villages ont été bâtis en employant ces matériaux (prêté pour un rendu car les châteaux avaient été édifiés par des corvées de serfs qui fournissaient le main d’œuvre non qualifiée; les générations suivantes se sont partiellement remboursées, si on peut dire)

Les châteaux des époques suivantes, bâtis pour fournir beauté, luxe et confort, ont davantage survécu à l'épreuve du temps - sauf accident - quand leurs propriétaires pouvaient les entretenir. Mais les modifications successives, les agrandissements, les restaurations, sont quasiment tous des anachronismes qui se sont succédé les uns les autres. Exemple flagrant? Versailles! Il suffit de comparer le corps central, modeste palais du XVIe-XVIIe siècles avec les ailes et annexes ajoutés progressivement, toutes dans un style différent, pour le réaliser. Et que dire du Louvre? Du palais de justice de Paris qui inclut la Conciergerie?

Cathédrales? La quasi totalité d'entre elles ont vu leur édification s'étaler sur des siècles, la fin du chantier n'ayant que très peu de rapport avec ce qui était initialement prévu (certaines ont commencé à l'époque romane pour d'achever pendant le gothique flamboyant. Chartres, la plus célèbre, fut initiée au tout début du gothique pour être achevée peut de temps avant la renaissance. Si les édifices religieux qui suivirent sont en général d'une unité de style relative (voir St Sulpice, la Madeleine, le Panthéon, etc.) ce n'est que parce que les chantiers étaient nettement plus brefs. Soufflot supervisait ses œuvres du début à la fin quand au moins cinq concepteurs se succédèrent pour venir à bout de la cathédrale de Strasbourg. Chacun avec des idées différentes, chacun devant composer avec des conseils de notables différents, avec des budgets qui évoluaient selon le temps, avec des procédés techniques plus évolués. Enfin et surtout personne ne se sentait lié par "l'esprit" du concepteur d'origine (pour Strasbourg, par exemple)

De nos jours il serait inconcevable d'entacher l'esprit de l’œuvre initiale. Déjà, la notion de propriété intellectuelle de l'architecte considéré comme un artiste l'interdit. On en arrive même à une conception "ayatollesque" comme lorsqu'on prétendit interdire aux Havrais de planter des arbres dans leur ville reconstruite après sa destruction complète en 1944 par Auguste Perret, sous prétexte qu'il ne l'avait pas prévu. Mort en 1954, qui peut prétendre que s'il avait été plus jeune lors de la conception, si de ce fait il avait vécu plus longtemps, il n'aurait pas acquiescé d'enthousiasme à l'idée de mettre du vert dans une conception urbanistique certes géniale pour l'époque, mais très froide?

Souvenons nous que lorsque Napoléon III chargea Baltard de bâtir à Paris des Halles modernes dignes de la capitale, fonctionnelles et surtout hygiéniques, il n'y eut quasiment aucune opposition quand bien même cela devait modifier le cœur historique de Paris. Idem pour les transformations opérées par Haussmann, analysées et critiquées de nos jours (buts parmi d'autres: énorme spéculation immobilière, dispersion des classes dangereuses, raisons stratégiques: dans le vieux Paris, la Commune de 1871 aurait sans aucun doute triomphé quand dans le Paris haussmannien elle fut écrasée par les mouvements de troupe bien organisés et par l'artillerie facilement utilisée)

A l'opposé, souvenons nous de la bataille homérique, plus tard, contre l'édification du centre Beaubourg (voulu par Pompidou) dans ce quartier (la raffinerie comme on disait à l'époque). Giscard voulut même arrêter les travaux à peine commencés, il fallut la menace de démission de son premier ministre qui vénérait Pompidou pour qu'il cédât.
A contrario on a laissé la plupart des pavillons Baltard partir à la ferraille sans protestation, ce qui est un crime contre le patrimoine puisqu'ils étaient facilement transportables ailleurs (ces pavillons ayant moins d'un siècle n'étaient pas assez patrimoniaux au goût de certains). Ensuite pour habituer le public à l'idée de forum, on a laissé des années durant béer le trou des Halles.

C'est au XIXe siècle qu'apparut Viollet-le-Duc qu'il est de bon ton de conspuer de nos jours (toujours le second travers: analyser les faits d'une époque passée, parfois lointaine et des fois relativement récente, avec la mentalité de notre époque).

En réalité le personnage est un visionnaire, un des premiers qui eurent l'idée que si on ne connaissait pas le passé, on vivait mal le présent et on ne pouvait forger l'avenir sur des bases saines. Il s'est attaché à sauver le patrimoine avec les moyens et les connaissances de son époque, devant tenir compte de la mentalité du moment faute de quoi il n'obtiendrait pas les crédits nécessaires, versés par la puissance publique ou alloués par des mécènes qui avaient de ce fait leur mot à dire.

Sauver Notre Dame?  (sur le point de s'effondrer tant elle était dans un état précaire) D'accord, mais quelle cathédrale? La vraie, l'originelle dont au bout du compte on savait peu de chose et ce qu'on savait, ce n'était plus dans l'air du temps? (en dehors des offices, comme dans toutes les cathédrales, au Moyen Âge les murs étaient couverts de fresques naïves, d'inscriptions - on dirait des tags, de nos jours -, on y voyait des jongleurs, des montreurs d'ours, des gens venus y quêter un peu de chaleur, ça schlinguait à cause des détritus et des charognes de ceux enterrés juste sous les dalles, celle dont des bâtisses frôlaient la façade qu'on voyait sans aucun recul) ...
ou une vision néo-romantique, celle de Totor la Pelloche avec son Esmeralda, son Quasimodo, ses gargouilles à profusion, son parvis sur lequel - incroyable anachronisme! - il fallait qu'il y ait assez de place pour qu'on y pendit Esmeralda sur un gibet permanent largement visible du haut des tours! D'où l'actuel parvis (à cet égard, celui de la cathédrale St Etienne de Meaux est infiniment plus proche de la réalité médiévale)

Viollet le Duc, à supposer (et c'est loin d'être avéré) qu'il ait bien connu l'état originel de ND n'aurait jamais obtenu les appuis et les fonds nécessaires pour la reconstituer ainsi. Cela plus l'idée pas ancrée dans les esprits (dont le sien) de la nécessité absolue d'une restauration à l'identique, a mené à la cathédrale de maintenant, certes critiquable mais quand même préférable à... une pure et simple démolition assortie d'une construction saint sulpicienne ou pire, d'un autre Sacré-cœur!

Il en fut tout autant des autres monuments conservés et restaurés par Viollet de Duc, en fonction des mentalités de l'époque et des exigences des propriétaires et de ceux qui... payaient. Ce qui causa certes des dommages peut être regrettables, à comparer avec les dommages qu'on déplorerait sans cette conservation imparfaite. Car le choix n'était pas entre des restaurations comme on les conçoit de nos jours et des restaurations comme le faisait Viollet le Duc. C'était entre la seconde alternative et... des démantèlements ou du grand n'importe quoi n'ayant plus aucun rapport avec l'originel

Et c'est là qu'on sombre dans le premier travers : censurer Viollet le Duc en fonction de ce qu'on pense de nos jours, à savoir qu'une restauration ne doit en aucun cas toucher à l'esprit d'origine.



********************

Mais... qui nous dit que notre état d'esprit actuel - et récent - face à la conservation et aux restaurations sera celui des générations futures?
Qui nous dit que ces dernières ne se dégageront pas de la mentalité actuelle "c'est ancien donc il faut forcément garder, qui plus est en le sacralisant?" Quel intérêt par exemple, à Meaux, de conserver ce tas de pierres informes, la dent creuse, dite tour du bourreau (rien ne permet d'établir que le dit bourreau vécut là - et quand bien même?), quand on peut fort bien en conserver une maquette, des photos, le tout exposé pour qui cela intéresserait dans une salle consacrée aux vestiges meldois qui ne sont pas véritablement patrimoniaux?

La vieille prison de Meaux? Je faisais partie de ceux qui se sont élevés contre sa démolition initialement prévue par JF Copé, parce que ce bâtiment a un intérêt relatif pour qui se penche sur l'architecture pénitentiaire telle qu'elle fut pensée au XIXe siècle. Mais en sachant garder raison! Dans mon esprit, c'était à condition qu'on lui trouvât un raison d'être, pas qu'on la sanctuarise comme des opposants pour s'opposer l’exigeaient (des anciens acolytes de Copé qui l'aidèrent à conquérir Meaux et qui depuis s'en sont détachés, sans doute faute de ne pas en avoir été suffisamment remerciés), se disant même "très attachés à leur prison" (enclavée, peu visible de ce fait, et dont je vois mal en quoi dans ces conditions on peut y être "attaché" sauf si on en fut pensionnaire et qu'on y coula des jours heureux... ce qui est assez rare).

Intéressante sur le plan architectural mais pas suffisamment pour en faire un "musée"... donc pour la garder, il fallait la transformer en bâtiment fonctionnel et là on pouvait discuter de ce qu'on en ferait! Ensuite sans doute vaut-il mieux prendre son temps et avoir les moyens de réaliser quelque chose de pensé et d'utile, surtout que la bâtisse attend depuis plus d'un siècle, que ses bases sont solides et de ce fait, elle peut patienter le temps d'un mandat électoral quand les finances locales ne permettent pas de tout faire en même temps.

Quand tout est patrimoine, plus rien n'est patrimoine et il faut sérier l'essentiel pour mieux le préserver. Les possibilités de conservation du passé sous forme de maquettes, de représentations virtuelles en 3D assorties de prises d'échantillons ouvrent des perspectives nouvelles.
Quant à savoir si, pour les édifices historiques de renom on doit comme de nos jours les restaurer en n'ajoutant rien, en ne conservant que ce qui subsiste de nos jours ou si on peut se permettre des audaces (une seconde tour à la cathédrale de Strasbourg ou de Meaux)... pour le moment le débat semble ne même pas pouvoir s'ouvrir.

Rien ne dit que dans les décennies à venir il en sera de même. Mon opinion personnelle est que si on se lance dans une telle démarche, il faudra privilégier l'anachronisme. Pas rajouter, dans le cas d'une cathédrale, une tour jumelle ou d'un style approchant, mais créer un élément résolument futuriste.


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Complément pour le besoin en prisons, dès le début du XIXe siècle.

On a commencé par affecter des bâtiments pas faits pour ça à l'origine comme l'abbaye de Clairvaux, devenue centrale du même nom, le fort du Hâ de Bordeaux, St martin de Ré etc.. Très vite on s'est rendu compte que les aménagements coûtaient au bout du compte plus cher que de concevoir des bâtiments ad hoc qui en outre devaient remplir un certain cahier des charges. Encellulement individuel en dehors des heures d'atelier, "être vu sans voir", règle du silence etc. Cela a mené selon les travaux de Bentham (entre autres) à ces maisons d'arrêt et centrales souvent "pentagonales" avec le cœur du dispositif dans une tour centrale. (Mazas, Santé, les deux Roquettes, Fresnes, Melun, Baumettes, etc. La maison d'arrêt de Meaux appartient, sous un modèle réduit, à cette famille)
Cordialement


Dernière édition par benjamin le Jeu 30 Juil 2015, 18:38, édité 1 fois
Fabien B.
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Jeu 30 Juil 2015, 16:30
Sur la question de l'architecture et du patrimoine je vous rejoins totalement. Le meilleur moyen de valoriser le patrimoine, c'est en l'occupant et en le faisant vivre dans notre temps.

La notion de patrimoine telle qu'on la connait aujourd'hui est récente effectivement. Très liée à l'intérêt de la classe bourgeoise du XIXeme siècle qui se cherchait aussi une histoire, des racines. Et qui souvent a été la chercher dans le moyen âge (voir le tout début de la Renaissance), c'est à dire avant "l'ancien Régime" auquel la Révolution à mis fin. Et comme vous le signalez Benjamin, on trouve la vision de cette époque incarnée par les écrits de Victor Hugo, par l'architecture de Viollet le Duc, ou par les travaux d'Haussmann, etc.

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Je met un bémol aussi : la ruine c'est du patrimoine. Cette notion aussi vient du 19ème siècle, de sa vision romantique. Et il est sans doute bien que des ruines existent aussi en ville. Et pourquoi pas à Meaux conserver la tour du Bourreau après tout ?

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Par contre il ne faut pas "patrimonialiser" ce qui n'existe plus. Et c'est là par exemple que la ville se trompe en mettant des panneaux historiques donnant des informations sur des choses qui ne sont plus a voir (les moulins de l'échelle, les moulins du marché...) Et il ne faut pas non plus patrimonialiser ce qui existe toujours, même quand ce qui existe vit dans le souvenir d'un passé plus glorieux : par exemple la promenade du jardin des Trinitaires.
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Ven 31 Juil 2015, 17:23
J'ouvre une parenthèse...


J'ai déplacé une partie de la discussion qui avait déviée du sujet originel, à savoir la tour nord de la cathédrale. La discussion est à retrouvée ici > "Et si... on rasait la tour du Bourreau ?"
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Téel
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Mer 02 Sep 2015, 20:37
Je voulais prolonger un peu plus longuement ma position à propos de ce sujet.

Un message qui a été un peu long à mûrir, car c'est toujours pour moi un sujet délicat à aborder, le devenir du monument historique. C'est un sujet concentre à lui seul des notions la fois complémentaires et contradictoires, ce qui explique souvent notre schizophrénie à leur égard. Je ne pense pas qu'il faille par principe considérer ces monuments comme intouchables, pas plus qu'il ne faille les considérer comme, par principe, touchables.

Mais après tout, pourquoi pas, considérons ce monument comme inachevé, et coiffons-le d'une tour contemporaine. Inscrire ce monument du moyen-âge dans la lignée de ce qu'il a toujours été, à savoir, un objet vivant, modelé selon les besoins de chaque époque, selon les goûts de chaque siècle avec les techniques architecturales de son temps, pour l'adapter à des problématiques contemporaines (désertion des lieux de culte, densification des centres urbains, dynamiques économiques) c'est intellectuellement recevable et sûrement le point de départ d'un projet intéressant.

Pourtant, il y a dans ce projet une part d'arbitraire, il faut bien l'admettre, qu'on y adhère ou pas. En effet, poussons le raisonnement plus loin. Cette cathédrale aurait dû être couronnée de flèches si elle avait été achevée, pourquoi donc ne pas restituer des flèches contemporaines ! Et puis, la façade aurait pu être reconstruite dans le style grec à la renaissance, et c'est sûrement tout l'édifice qui aurait dû être détruit pour faire place à un édifice néoclassique au XVIIIème siècle... ! Le problème, c'est donc qu'on en vient assez vite à faire des choix arbitraires qu'on ne peut intellectuellement plus argumenter sur une base purement historique : achever un monument, pourquoi pas, mais quel état d'achèvement ou d'inachèvement décidons-nous de retenir, et pour quelles raisons ? Sans parler de tous les problèmes de conflits avec l'existant que ça impose. Peut-être que la tour de bois possède une charpente authentique et dans un excellent état de conservation, dès lors, elle pourrait posséder un véritable intérêt historique, à défaut d'une véritable valeur esthétique ? La valeur historique d'un monument (c'est à dire l'ancrage du monument dans son contexte historique à tous les degrés, histoire de la ville de Meaux, histoire de l'architecture, histoire des techniques de construction, etc) n'est pas accessoire, elle en fait partie intégrante, au même titre que ses qualités plastiques, architecturales, urbaines, bien entendu, voire, pourquoi pas sociales, culturelles etc. Ces valeurs ont toutes des exigences qui les rendent parfois incompatibles entre elles, mais avec lesquelles il faut savoir habilement jongler, ou parfois trancher en faveur de l'une ou l'autre.

L'exemple type de ce point de vue est la fameuse tour du bourreau (évoquée dans un autre sujet) qui a, d'un point de vue historique un intérêt certain, mais qui ne possède aucune valeur plastique ni urbaine quelconque et dont, effectivement la question du maintient en l'état se pose vraiment. Je pense qu'en cela, la charte de Venise (et non pas d'Athènes, comme j'allais l'écrire instinctivement ^^) présente un bon compromis qui a sa logique du point de vue d'une approche "scientifique" et "raisonnée" de l'intervention sur les monuments historiques, en tant que documents d'art et d'histoire. A mon sens, je ne trouverais pas idiot de la faire évoluer vers un cadre plus large qui prenne en compte le monument dans sa dimension "métaphysique" et pas seulement "physique", comme, concevoir qu'un monument historique perd aussi de son sens quand il perd son usage, quand on en oublie le contexte urbain qui a précédé à son édification, les techniques de construction (les chantiers de restauration sont toujours l'occasion de réapprendre des techniques oubliées)... et que sais-je encore ! Et bien entendu, y intégrer les problématiques d'aujourd'hui : environnementales, culturelles, sociales, etc.

La question posée plus largement serait donc, est-ce que construire une tour contemporaine au dessus d'une cathédrale a vraiment du sens quand on parle d'un édifice qui du point de vue de ses dimensions, de son implantation dans le tissu urbain, considérant sa destination actuelle, est franchement obsolète ? En changer la destination (pourquoi pas, dans le cadre d'un projet urbain à une plus grande échelle) suffirait-il d'ailleurs à justifier un changement radical de l'édifice ? Dans ce cas, la question ne se poserait plus en tant qu'achèvement d'une cathédrale gothique, mais bien en tant qu'extension contemporaine d'un édifice plus ancien que le projet justifie (ou non, mais c'est un autre débat !)

Une fois de plus, je pense qu'une intervention sur un monument historique n'est pas a priori condamnable, tout comme elle n'est pas non plus a priori souhaitable, et je déteste les procès en sorcellerie qui visent à ringardiser à tout prix les partisans de la non-intervention (ou ceux du simple respect des règles urbanistiques en vigueur, suivez mon regard)... j'aurais beaucoup à dire à ce sujet !

Dans le cas qui nous concerne, si l'on devait faire une intervention contemporaine, j'irai plutôt réfléchir à la reconstruction du tissu urbain trop souvent détruit au XIXème siècle selon la désagréable habitude qu'avaient les architectes restaurateurs de vouloir "dégager" les monuments. Or, la cathédrale de Meaux, tout comme de nombreux autres édifices de cette époque, ne peuvent se concevoir d'un point de vue urbain sans les échoppes et petits immeubles qui en garnissaient les contreforts, et qui ont laissé place à des espaces vides et inutiles, des "places" qui n'en sont pas. Des documents anciens, des fouilles archéologiques peuvent attester de l'emplacement et des volumétries qu'on pourrait imaginer restituer (non pas à l'identique, bien sûr !) mais de manière résolument contemporaine, sur une base d'un programme réaliste. Pourquoi pas à destination de commerces de bouche de qualité, restaurants gastronomiques, porter bien haut le savoir faire culinaire meldois, autre forme de patrimoine à préserver Wink

Bref, ce sont des questionnements qui méritent débats, il n'existe pas de réponse adaptable à tous les cas, c'est pour ça que je suis a priori plutôt conservateur et réticent quand on touche aux monuments historiques. Pour autant, je fais une grande distinction entre les monuments historiques, le patrimoine bâti dans son ensemble, et ce qui est juste "ancien" sans vraiment de valeur particulière : tout ce qui est ancien n'est pas forcément intéressant. La ville doit pouvoir se renouveler, évoluer, changer en prenant en compte ces contraintes, et je pense qu'on dispose de bons outils pour ça, il est nullement question de s'enfermer dans un dogme quel qu'il soit.
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Mer 02 Sep 2015, 22:56
Excellente intervention Téel. Merci ! Smile
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Dim 06 Sep 2015, 17:55
Oui c'est du lourd  Cool 
Bravo pour le rétablissement de la vérité sur les "parvis de cathédrales" qui sont une invention récente
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Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ? Empty Re: Et si on... reconstruisait la tour sud de la cathédrale ?

Dim 06 Sep 2015, 19:33
C'était bien là le but d'élargir la discussion à partir d'un exemple "amusant". 

On peut rebondir sur le sujet du patrimoine. Je suis passé par la cité épiscopale et le jardin Bossuet aujourd'hui et j'avoue avoir été assez inquiet de voir l'état dans lequel certains éléments de patrimoine, les remparts en premier. Je vais ouvrir un nouveau sujet à ce propos.
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